NUTRITION ET HYDRATATION DE LA PERSONNE ÂGÉE

LES RECOMMANDATIONS DE L’ESPEN

La dénutrition et la déshydratation sont fréquentes chez le sujet âgé, et l’obésité est un problème croissant. En pratique clinique, il est souvent difficile de savoir quelles stratégies adopter pour traiter ces affections. Pour nous y aider, la Société Européenne de Nutrition Clinique et Métabolisme (ESPEN) a publié 82 recommandations fondées sur des données scientifiques solides. Le point sur quelques-unes d’entre elles.

DEPISTER ET TRAITER LA DENUTRITION

Le dépistage de la dénutrition devrait être systématique chez les personnes âgées, y compris chez les personnes en surpoids ou obèses. Lorsqu’une dénutrition est détectée, une évaluation nutritionnelle complète doit être réalisée et intégrer les données sur les préférences alimentaires individuelles ainsi que les capacités fonctionnelles de la personne (capacité de mastication, déglutition, dépendance alimentaire, pathologies…).

L’intervention nutritionnelle personnalisée doit impliquer les soignants et la famille. Elle doit fixer des objectifs et les réévaluer régulièrement.

Favoriser la prise alimentaire

Assistance pour manger, environnement agréable, repas partagés, livraison de repas à domicile, conseils personnalisés concernant la nutrition ou activité physique sont parmi les recommandations de l’ESPEN pour redonner le plaisir et l’envie de manger  aux personnes âgées dénutris ou à risque de dénutrition. Les personnes à domicile ou leurs aidants peuvent se voir proposer des conseils nutritionnels individualisés par des diététiciens

Adapter l’offre alimentaire

Une offre alimentaire spécifique peut être proposée pendant (aliments enrichis) ou entre les repas ou le soir (en-cas et aliments à manger avec les mains) pour augmenter les apports des sujets. Les compléments nutritionnels oraux (CNO) enrichis en énergie et en protéines (400 kcal/jour et >30g de protéines /jour) peuvent aussi compenser les apports lorsque les conseils nutritionnels ou les stratégies d’enrichissement alimentaire ne suffisent pas. Leur efficacité sera alors testée après 1 mois avec leur consommation suivie régulièrement. L’offre sera adaptée aux préférences du sujet (sucré salé, saveurs, textures…). Aux sujets présentant des signes de dysphagie oropharyngée ou des problèmes de déglutition, des aliments à texture modifiée et enrichis seront proposés.

5 pathologies nécessitent une attention particulière

Des recommandations spécifiques sont formulées pour 5 pathologies :

  • Dans le cas d’une fracture de la hanche : des CNO sont recommandés rapidement après l’opération,
  • Les personnes âgées hospitalisés pour une intervention chirurgicale doivent bénéficier d’un soutien nutritionnel et à l’hydratation pour prévenir le risque de délirium post-opératoire,
  • Les personnes âgées en dépression doivent être dépistés vis-à-vis de la dénutrition,
  • Des interventions nutritionnelles doivent être proposées aux patients âgées avec escarres ou présentant un risque d’escarres afin de prévenir le développement de ces dernières ou d’améliorer leur guérison.
  • Les personnes âgées diabétiques doivent être dépistés vis-à-vis de la dénutrition et pris en charge comme les personnes dénutris en évitant tout régime restrictif.

DEPISTER ET TRAITER LA DÉSHYDRATATION

Le dépistage de la déshydratation devrait être systématique chez les personnes présentant un changement impromptu de leur état clinique. Un seuil d’osmolarité plasmatique > 300 mOsm/kg est le signe d’alerte d’une déshydratation. L’EPSEN ne recommande pas de se fier aux signes comme la turgescence de la peau, la sécheresse de la bouche, le changement de poids, la couleur de l’urine ou encore l’impédancemétrie bioélectrique.

Tous les personnes âgées doivent être encouragés à boire suffisamment et régulièrement. Il faut leur proposer des boissons qui leur plaisent (eau, eau gazeuse, eau aromatisée, thé chaud ou froid, café, lait et boissons lactées, jus de fruits, soupes, smoothies…) et au moment où elles les souhaitent. Des adaptations des contenants (couleurs contrastées pour les personnes atteints de démence) ou des liquides épaissis (dysphagie) peuvent être proposées mais doivent faire l’objet d’une surveillance de leur état d’hydratation.

D’après l’article de Dorothée Volkert, Anne Marie Beck, Tommy Cederholm et al. ESPEN practical guideline: Clinical nutrition and hydration in geriatrics  Clinical Nutrition Vol 41 (4) p958-989 Apr 2022.