Aide au repas chez les sujets avec Alzheimer : la position de la main compte

La main du soignant, utilisée seule, posée sur celle du patient ou mise en dessous peut conduire à des résultats bien différents en terme d’alimentation et de comportement.  

Les résidents des maisons de soin qui nécessitent une aide au cours des repas sont à haut risque de dénutrition. Les sujets atteints de démence, en particulier, surtout lorsqu’ils refusent de manger ou boire, présentent des problèmes de déglutition ou d’apraxie. Une équipe de soignants d’un centre national d’excellence en soins gérontologiques de l’Université Duke de Durham (Caroline du Nord) a souhaité comparer trois techniques d’aide à l’alimentation auprès de patients avec démence. Ils ont publié leurs résultats dans le Journal of American Geriatrics Society 

Trois techniques d’aide à l’alimentation possibles

Réussir à faire manger un sujet présentant une démence nécessite au moins 3 compétences :

  1. savoir gérer la dysphagie et le risque d’aspiration
  2. savoir interpréter et gérer les comportements de refus de s’alimenter (tête tournée, bouche fermée)
  3. favoriser l’indépendance du sujet tout en lui fournissant une assistance pour qu’il ait un apport nutritionnel adéquat.

Les recommandations pratiques évoquent deux techniques d’aide à l’alimentation : 

  • la technique de main directe : le soignant tient le couvert et alimente le sujet sans implication de ce dernier ;
     
  • celle de la main dessus : le soignant met sa main sur celle du sujet qui tient le couvert et guide ou soutient son mouvement. 

Il existe une troisième technique, celle dite de la main dessous : le soignant tient le couvert mais place sa main sous celle du sujet qui peut ainsi initier et contrôler le mouvement. 
L’équipe de soignants basée en Caroline du Nord a comparé l’efficacité de ces trois techniques sur la prise alimentaire de 30 sujets atteints d’Alzheimer répartis dans 11 maisons de soin (88.5 ans en moyenne, 90 % de femmes). Une technique était testée sur 6 repas consécutifs (2 jours). La durée de l’aide à l’alimentation, la quantité ingérée ont été mesurés ainsi que le comportement de refus de s’alimenter des sujets à l’aide de l’échelle EdFED (Edinburgh Feeding Evaluation in Dementia). Au total,  540 repas ont été filmés (18 repas par résidents) puis analysés.

La main du soignant placée en dessous de celle du patient présente des avantages 

Le temps passé à l’aide à l’alimentation était le même quelle que soit la technique utilisée (41-45 minutes). La prise alimentaire était meilleure avec la technique de main directe (67 ± 15.2%) et la technique de main en dessous (65 ± 15.0) comparé à la technique de main dessus (60 ± 15.1%). Les comportements de refus de s’alimenter étaient plus fréquents avec la technique de la main au-dessus (8.3 ± 1.8%) comparée à la technique de la main directe (8.0 ±1.8%) et celle de la main en dessous (7.7 ± 1.8%). Pour les auteurs, la technique à utiliser doit être envisagée selon les capacités du sujet (énergie, force, préhension) et sa préférence. Elle peut changer d’un jour sur l’autre ou suivant le repas de la journée. Les techniques de la main directe et celle de la main en dessous sont à privilégier. Reste que ces trois techniques ne résolvent pas la problématique du manque de temps disponible des soignants pour alimenter les résidents.

Experimental Comparison of Efficacy for Three Handfeeding Techniques in Dementia. Batchelor-Murphy MK, McConnell ES, Amella EJ, Anderson RA, Bales CW, Silva S, Barnes A, Beck C, Colon-Emeric CS. J Am Geriatr Soc. 2017 Apr;65(4):e89-e94. doi: 10.1111/jgs.14728. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28165618