Dénutrition et cancer 

40% des personnes atteintes de cancers tous confondus sont dénutris.*

La dénutrition n’est pas à négliger, pour cause elle peut perturber les traitements, augmenter le risque de récidive ou de seconds cancers ainsi que le risque de mortalité.

La dénutrition a également des conséquences « non visibles ». Une personne atteinte d’un cancer et dénutrie aura un état de grande fatigue qui engendra de nombreux temps de repos. La personne s’isole et est plus vulnérable. Un impact psychologique se révèle alors, un état dépressif.

La dénutrition fragilise également l’immunité, entrainant une facilité d’infections et d’apparition d’escarres.

Pour toutes ces raisons, il est donc nécessaire d’être vigilant et de prévenir la dénutrition en analysant régulièrement l’état nutritionnel de la personne.

Prevenir la denutrition et la diagnostiquer

Evaluer l’état nutritionnel des patients afin de prévenir la dénutrition, consiste à :

  • Analyser la prise alimentaire (ou ingesta). Une diminution des apports est l’un des premiers signaux d’alerte.
  • Connaitre les indicateurs de dénutrition : pesées fréquentes, calcul de l’IMC (< 18.5kg/m2 chez l’adulte et 22 chez la personne âgée). Attention toutefois aux patients avec un IMC élevé. Une personne en surpoids ou en obésité peut être dénutris.

Une personne atteinte d’un cancer est dénutrie lorsque l’on constate une perte de poids supérieure ou égale à 5 % en 1 mois ou supérieure ou égale à 10 % en 6 mois. Cette perte de poids peut aussi être supérieure ou égale à 10 % par rapport à son poids habituel avant le début de la maladie. 

DENUTRITION ET CANCER : quelles prises en charges ?

Il est important de comprendre que la dénutrition n’est pas une conséquence du cancer. Les traitements contre le cancer ne vont pas stopper et soigner la dénutrition, bien au contraire.

A l’inverse, la dénutrition augmente la toxicité des traitements de part une fragilité immunitaire.

Dans un premier temps, il faut établir les causes de la dénutrition. Elle est associée à deux principales causes :

  • Une fonte musculaire et une perte de masse grasse provoquée par les cellules cancéreuses qui captent les ressources du corps.
  • Une diminution de la prise alimentaire : nausée, perte d’appétit qui conduit à une anorexie, prise alimentaire lente due à une fatigue généralisée, somnolence, difficulté à manipuler les couverts, traitements notamment la chimiothérapie qui provoque une altération du goût et de l’odorat (goût métallique).

Dans un second temps, il faut mettre en place une prise en charge nutritionnelle adaptée et évolutive.

Il est possible de :

  • Fractionner les repas : manger des petites quantités régulièrement (ex : 3 repas et 3 collations : petit déjeuner, collation, déjeuner, collation, diner, collation). Le fractionnement est à adapter selon les capacités de la personne.
  • Enrichir les repas par le biais de beurre, crème, fromage, etc. Exemple pour un velouté de légume seul, on ajoutera de la crème et du beurre afin de le rendre d’une part plus appétant par son onctuosité mais également par les odeurs que ces derniers vont dégager.  
  • Ne pas oublier le plaisir ! L’appétit passe par l’envie de manger. Il faut écouter les désirs du patient et essayer dans la mesure du possible, de les intégrer à l’apport journalier.
  • S’adapter aux capacités de la personne : si elle a une difficulté à la déglutition ou à ingérer le repas pour diverses raisons, il est possible d’adapter la texture sur les recommandations d’un professionnel de santé (médecins, idéalement orthophoniste). Toutefois, une vigilance sur le visuel et le goût est indispensable notamment pour la texture hachée ou mixée (assaisonnement, présentation).
  • Les Compléments Nutritionnels Oraux (CNO) : ce ne sont pas des substituts de repas. Il est indispensable d’avoir un apport alimentaire de base plus ou moins correcte pour une bonne assimilation. De plus, ils peuvent provoquer des désordres digestifs, par conséquent ils doivent être prescris raisonnablement. Deux à trois CNO par jour peuvent être intégrés à l’alimentation, l’objectif est double : observance et variété.
  • La nutrition artificielle : lorsque l’apport alimentaire est insuffisant ou impossible, la nutrition artificielle peut être prescrite. Elle est instaurée à l’hôpital et, au besoin, poursuivie au domicile avec la visite des professionnels adaptés.
  • Rester actif : enrichir les repas ne suffit pas, il faut également stimuler la masse musculaire. De plus, être actif permet d’ouvrir la faim. Là encore, l’activité doit être adaptée aux capacités du patient.

Vigilance à l’hygiène de vie, notamment l’état buccodentaire qui est source de difficulté à la prise alimentaire et d’altération du goût.

Auteur : Héloise Badaire, diététicienne nutritionniste

EFFETS SECONDAIRES : comment gérer son alimentation ?

Pendant un traitement oncologique, des effets secondaires peuvent avoir des répercussions sur votre état général.

Il est très important de noter que chaque individu est unique et 2 personnes peuvent ne pas réagir de la même façon. C’est pourquoi il faut écouter son corps et personnaliser le plus possible sa prise en charge. Si certains conseils conviennent pour certains patients, ils peuvent à l’inverse ne pas vous convenir.  

         Ce qui est très important c’est de maintenir le goût et l’envie de manger. Si vous n’avez jamais faim, n’attendez pas de la ressentir et essayer de prendre des aliments qui vous font envies (même si c’est du fromage à 15h). N’attendez pas que l’appétit arrive pour vous mettre à table.

  • Si vous avez la sensation de satiété précoce, fractionnez : adaptez l’alimentation à votre état. N’hésitez pas à manger à des horaires qui vous conviennent le mieux.
  • En cas de « petit appétit », privilégiez les aliments à haute densité énergétique et riches en protéines comme les viandes, poissons ou œufs et les produits laitiers pour limiter les effets de la dénutrition.
  • Si vous pouvez, faites des assiettes avec des petites quantités pour éviter de vous décourager en voyant un plat trop copieux.

         Pensez à enrichir l’alimentation : avec de la poudre de lait, ou en ajoutant des œufs dans les préparations telles que les purées ou les quiches… Si l’alimentation est insuffisante, il est possible d’utiliser des poudres de protéines, présentes en pharmacie. Demandez conseils à votre médecin, diététicien ou pharmacien.

Certains aliments ont des odeurs particulièrement fortes, pouvant provoquer des aversions inexpliquées : comme le poisson, certains fromages ou le café. Dans ce cas, il vaut mieux les éviter.  Ce qui est important c’est de ne pas supprimer tout un groupe d’aliments comme les aliments riches en protéines (produits laitiers, viandes, poissons, …). Si vous ne pouvez pas les ingérer, il faut trouver des équivalences ou utiliser les solutions d’enrichissements présentes en pharmacie.

Si vous trouvez que tous les plats ont le même goût et que vous les trouvez fades, pensez à ajouter épices et aromates (coriandre, curry, romarin…). Si au contraire, vous trouvez que les plats ont un goût fort qui vous gêne, éviter les condiments comme l’ail ou l’oignon ou certaines huiles végétales comme l’huile de colza.

         Trouvez la juste association de couleurs ! En effet, de la même façon qu’un plat mono couleur peut être triste (un filet de poisson accompagné de riz et chou-fleur) et vous couper l’appétit, un plat avec trop de couleurs peur rebuter également.

         Préférez les plats à température ambiante ou bien froids. Cependant, faites attention ! Certains traitements sont incompatibles avec les aliments froids. Pensez à vous renseigner. Il faut également savoir que certains traitements peuvent avoir un effet sur le transit intestinal. Ils peuvent soit l’accélérer soit le ralentir. En effet, si le traitement altère votre microbiote intestinal, demandez conseils à votre diététicien(ne) car il existe des solutions pour améliorer votre flore pendant et après le traitement.

Auteur : Maria Helena LADOUX MARTINEZ, diététicienne nutritionniste

*Source : Lutte contre la dénutrition