Nutrition du sujet âgé : un rôle pour l’innovation alimentaire

Avec l’allongement de l’espérance de vie, le concept de vieillissement réussi, prend tout son sens. La nutrition est une des stratégies possibles pour le favoriser à condition de s’adapter aux besoins particuliers des sujets âgés.

Quatre chercheurs irlandais, spécialistes en sciences des aliments, ont fait le point sur les différentes raisons expliquant les insuffisances d’apports des sujets âgés et ont présenté quelques-unes des innovations alimentaires qui permettent d’améliorer leur état nutritionnel dans le Journal of Food Science. 

Des besoins augmentés mais des apports qui déclinent

Les chercheurs estiment que les aliments devraient pouvoir répondre aux besoins spécifiques des sujets âgés – parfois atteints de pathologies chroniques, d’une perte de capacités fonctionnelles ou de déclin cognitif –  de manière à optimiser leurs capacités immunitaires, leur santé osseuse et leurs fonctions cognitives. Les études sur cette catégorie de population suggèrent que leurs besoins en protéines, calcium et vitamine D sont, en particulier, augmentés. Elles montrent aussi que des apports supérieurs aux valeurs nutritionnelles de référence pour les vitamines A, B, E et le zinc leur sont bénéfiques.
Cependant, dans ce groupe de population les dépenses énergétiques dépassent bien souvent les apports. Après 70 ans, la consommation alimentaire peut diminuer de 25%. Dans les cas extrêmes, les apports énergétiques ne dépassent pas 1000 kcal par jour. En institution, ils sont près de 60% à avoir des apports énergétiques insuffisants. De fait, avec l’avancée en âge, les freins à une alimentation suffisante et équilibrée sont nombreux : la perte de mobilité et d’autonomie pour acheter et préparer les aliments, le prix élevé de certains aliments, les effets secondaires des médicaments sur l’appétit, des problèmes d’isolement, de dépression, de dentition, de déglutition ou des troubles de l’olfaction ou du goût. Les apports inadéquats en macro et micronutriments favorisent alors de nombreux problèmes de santé comme la dénutrition, l’ostéoporose, la sarcopénie (fonte musculaire) et le déclin cognitif.  

Des innovations « sur-mesure » sont nécessaires

Les produits développés pour cette catégorie de population doivent prendre en compte trois facteurs :

  1. la modification des perceptions sensorielles des sujets (apparence, taille, saveur, couleur, texture, consistance) et leurs besoins nutritionnels (enrichissements),
  2. l’accessibilité et la disponibilité ;
  3. le format et l’emballage du produit, qui doivent être adaptés à cette cible (portion, conservation, facile à ouvrir…). 

Plusieurs études cliniques ont déjà testé ces paramètres. Elles révèlent que :

  • Les préférences des sujets âgés vont vers des saveurs plus prononcées et des produits aromatisés (épices, herbes aromatiques, oignons, saveur bacon ou fromage…). 
  • La forme et l’apparence visuelle ont également un impact sur la consommation. Ainsi, chez les patients atteints de maladie d’Alzheimer, des aliments pouvant être facilement pris dans les mains, constitués de couches de couleur et que l’on peut manger avec une sauce, sont davantage consommés que des aliments mixés. 
  • Un travail sur la texture des aliments, réduisant l’effort de mastication à fournir, donne également de bons résultats de consommation. Pour autant, les aliments trop lisses et souples ne sont pas appréciés.  
  • Des emballages plus faciles à prendre dans les mains, à réchauffer et à ouvrir, portionnables et avec des contrastes et une typographie adaptés à la baisse de l’acuité visuelle pourraient lever certains freins à la consommation.   

Pour les auteurs de la revue, ces innovations « sur mesure » qui peuvent faciliter le « bien vieillir », encore trop peu présentes sur le marché sont urgemment nécessaires.

Mitigating Nutrition and Health Deficiencies in Older Adults: A Role for Food Innovation? Baugreet S, Hamill RM, Kerry JP, McCarthy SN. J Food Sci. 2017 Apr;82(4):848-855.  Article en accès libre sur http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/1750-3841.13674/epdf